« Cette défaite va me hanter à vie », « Je suis rongé par la honte », « J’ai vécu un enfer, un cauchemar »… Ces mots sont ceux d’athlètes ayant connu l’échec aux Jeux olympiques (JO) de Paris 2024. Ils révèlent, dans la gestion de la performance et de l’après-performance, des failles susceptibles d’engendrer de sérieuses conséquences sur leur santé mentale. Un risque auquel sont également confrontés les 4 400 athlètes qui s’apprêtent à disputer les Jeux paralympiques, du 28 août au 8 septembre.
Ces réactions marquent les limites de la préparation mentale orientée sur la « gagne » au détriment d’un apprentissage de la gestion de l’échec, considère Denis Hauw. Ce psychologue et professeur de psychologie du sport à l’Université de Lausanne (Suisse) étudie les dispositifs psychologiques de production de la haute performance sportive et accompagne des sportifs de haut niveau et leurs entraîneurs dans différentes disciplines olympiques depuis plus de vingt-cinq ans.
Nombre de participants de Paris 2024 ont eu recours à la préparation mentale. Comment expliquer les réactions de dévalorisation, voire d’effondrement, de ceux qui ont vécu leur performance comme un échec ?
Cela tient à la confusion qu’ils font entre leur personne et leur performance. En France, la préparation physique comme mentale des sportifs de haut niveau formate pour la « gagne » sans inscrire l’échec dans les perspectives possibles. Selon un standard culturel obsolète, on vise la haute performance en niant toute éventualité d’échec par crainte qu’il se produise. Or, c’est cette crainte qui paralyse.
On oublie que le sportif est avant tout un être humain, que l’échec fait partie intégrante du sport de haut niveau et que s’y confronter et apprendre à le gérer est un objectif essentiel pour permettre la libération des énergies en compétition et la construction d’un athlète résilient. Par conséquent, lorsque l’échec survient, de nombreux sportifs se retrouvent démunis et subissent des effets immédiats tels que l’effondrement émotionnel, et d’autres plus diffus ou retardés, comme des baisses de niveau de performance, ou pire, des états dépressifs ou traumatiques.
La pression liée aux attentes supposées ou fantasmées du public lors d’épreuves à domicile est-elle un facteur aggravant en cas d’échec ?
Le facteur « domicile » – et la médiatisation qui en découle – ajoute à la situation du stress de la compétition. En cas d’échec, le sentiment de culpabilité et de vulnérabilité et la déception sont souvent décuplés de n’avoir pas réussi à montrer à ses proches et à son pays « qui on est ».
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